Le mercredi 9 décembre 2020, les partenaires sociaux sont enfin tombés d’accord sur la signature d’un accord national interprofessionnel (ANI) portant sur la santé au travail, un sujet qui n’avait pas été mis à l’honneur depuis 13 ans ! Revenons sur les différentes mesures qui devront constituées la future loi.
Les principales mesures de l’ANI sur la santé au travail
C’est un ANI inédit qui vient d’être accepté par une majorité des syndicats. Son objectif principal est de “mettre la prévention au centre et améliorer les dispositifs existants notamment pour les moyennes et petites entreprises”.
La prévention en première ligne
La lutte contre les risques professionnels est l’une des priorités de l’ANI sur la santé au travail. Il est indispensable de “s’attaquer en amont aux causes profondes des risques avant qu’ils ne produisent leurs effets” sur l’état de santé des salariés. A travers cette mesure, l’objectif est de lutter efficacement contre la désertion professionnelle, un véritable fléau provoqué par le mal-être des employés.
Le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) reste l’outil essentiel d’évaluation des risques professionnels et de la traçabilité des expositions.
Les services de SST se voient attribuer un nouveau rôle de prévention. L’ANI propose d’améliorer “la coordination, le maillage territorial et les missions de l’ensemble des acteurs de la santé au travail qui comprennent également un très grand nombre d’acteurs institutionnels”.
Les visités médicales professionnelles confiées aux médecins de ville ?
Il s’agit là d’un sujet qui a fait beaucoup débat lors des étapes de négociations entre les syndicats. Pourtant, la France est dans une situation compliquée en raison d’une pénurie de médecins du travail. Ils seraient moins de 5 000 et beaucoup d’entre eux vont bientôt partir à la retraite sans être remplacés.
L’ANI sur la santé au travail prévoit donc que les médecins de ville seront autorisés à faire passer les visites médicales périodiques et de reprise du travail aux salariés. Ces professionnels de la santé seront préalablement sélectionnés, sur la base du volontariat, et formés pour se substituer à leurs confrères.
La responsabilité de l’employeur sur la prévention des risques
Les différents syndicats ont tenu à aborder le sujet épineux de la responsabilité de l’employeur vis-à-vis des risques et des maladies professionnelles que peuvent encourir les salariés sur leur lieu de travail. Le texte présenté et signé stipule que la responsabilité d’un employeur ne pourra pas être engagée s’il est prouvé qu’il a mis tous les moyens en œuvre pour prévenir des risques professionnels. Il est le garant de la santé et de la sécurité de ses employés, et a donc l’obligation de veiller à la conformité des dispositifs mis en place.
Maintenir les salariés fragiles en emploi et les accompagner
Chaque année, selon le Syndicat national des professionnels de la santé au travail (SNPST), 80 000 salariés sont licenciés par leur employeur car la médecine du travail les a jugés inaptes à leur poste de travail. Ces salariés fragiles sont alors confrontés à une situation très difficile, tant financièrement que psychologiquement. Pourtant, aucun accompagnement spécifique n’est mis en place.
Dans le cadre de l’ANI, ces travailleurs devront être mieux suivis grâce à des “cellules” spécialisées sur ce sujet et instaurées au sein des services de santé au travail. Une visite médicale de mi-carrière devra également être réalisée par ces salariés fragiles afin d’éviter le licenciement et ses impacts.
La Qualité de vie au travail se voit confier de nouveaux objectifs
En 2013, un premier ANI avait donné lieu à la qualité de vie au travail. Ce nouvel accord national interprofessionnel vient renommer la QVT en Qualité de vie et des conditions de travail (QVCT). Si cela peut sembler anecdotique, il s’agit d’une modification qui regroupe de nouvelles mesures importantes. Les objectifs de la QVCT sont donc élargis et comprennent désormais :
- L’articulation des sphères de vie,
- Les conditions d’exercice du travail (management, moyens, relations interpersonnelles et collectifs du travail),
- L’utilité et le sens du travail, ses transformations rapides,
- La conduite du changement,
- La mobilisation de modalités d’organisation du travail tel que le télétravail
Tous les secteurs d’activité concernés par l’ANI sur la santé au travail
Cet accord national interprofessionnel sur la santé au travail concerne toutes les entreprises et tous les secteurs d’activité. C’est donc l’ensemble des salariés qui ont connu des changements au cours de l’année 2021.
Dans le texte de l’ANI, les syndicats ont proposé la création d’une “commission paritaire dédiée à la santé et à la sécurité au travail au sein des branches professionnelles”. Le même type de commission est suggérée pour les entreprises de moins de 300 salariés, dans le cadre du CSE.
3 syndicats favorables, la CGT défavorable et la CFTC sur la réserve
Selon Diane Deperrois, cheffe de file des négociateurs pour le Medef, “”cet accord est novateur avec comme colonne vertébrale la prévention, il comptera dans l’histoire des lois sur la santé au travail“. Elle précise également que la CFDT, FO et la CFE-CGC ont confirmé leur accord à l’issu de la discussion de mercredi. De son côté, la CGT avait prévenu qu’elle “ne signerait pas un texte entérinant de nouveaux reculs en matière de santé et sécurité”. Seul ce syndicat a exprimé son désaccord à ce jour. Enfin, la CFTC s’était donnée quelques jours de réflexion pour approuver ou désapprouver l’ANI. Les différentes parties avaient jusqu’au 8 janvier 2021 pour signer le texte présenté.